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Just a Finger : Galerie Littéraire
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1 décembre 2020

Je n'ai rien saisi de plus que des images dans un miroir

  

Chère mère,

J'ai été frappé, dans votre lettre, par le passage où vous dites que, pendant votre séjour à Nuenen,
vous avez tout revu " avec un sentiment de reconnaissance que cela vous ait appartenu autrefois " - et celui de l'abandonner, sereinement, à d'autres. Insaisissable, comme des images dans un miroir - c'est ainsi que cela s'est passé ; la vie, le pourquoi des séparations et des départs, la persistance de l'angoisse, il n'y a rien de plus à en comprendre.
Pour moi, la vie peut bien demeurer solitaire.
De ceux à qui j'ai été le plus attaché, je n'ai rien saisi de plus que des images dans un miroir.

Vincent van Gogh, Lettre à sa mère (12 juin 1890) 

Art, Van gogh art, Oil pastel art 

Alain Fleischer, maître des illusions
Une exposition propose des œuvres anciennes et récentes de l’artiste qui dévoilent les images pour ce qu’elles sont,
des leurres charmants et dangereux.

La-Traversee-Des-Apparences-Alain-Fleischer

« Je ne suis qu’une image », répète en boucle la voix enregistrée. On croirait qu’elle sort d’un tourne-disque, mais celui-ci est immobile et peint en blanc pour devenir l’écran sur lequel est projetée l’image du disque tournant : trompe-l’œil, trompe l’ouïe. La phrase fatale a été convertie par un ordinateur en graphique, qui dessine une forme. Celle-ci se retrouve dans chacun des caissons lumineux disposés dans la salle, devenue squelette de poisson, récif rocheux se reflétant dans une eau trop calme, dentition d’un crâne de cheval ou lame de poignard. Ce sont donc des images obtenues à partir de la phrase qui dénonce la fausseté de leur nature. Laquelle phrase peut aussi s’entendre grâce à un lecteur optique qui reconvertit le graphique en son, retour à l’origine après le cycle des métamorphoses. 

Le regardeur se laissera emporter à son insu par l’interprétation qui lui convient le mieux

Les images qui, au premier regard, sembleraient les plus véridiques sont elles-mêmes touchées par l’épidémie du doute.le_voyage_du_brise-glace_1985_c_alain_fleischer
Ainsi du nu : a priori rien de plus simple qu’un nu.
Mais ce corps féminin, dont des fragments apparaissent entre des draps, était-il vraiment là ?
On peut tout imaginer, des tirages en noir et blanc disposés dans un lit, des projections sur le drap devenu écran ou d’autres subterfuges encore. Le regardeur se laissera emporter à son insu par l’interprétation qui lui convient le mieux. Sans doute voudra-t-il croire que ce corps était vraiment allongé, dénudé, sur cette couche en désordre, mais cette interprétation érotique est juste la plus banale et la plus naïve. Rien ne permet d’écarter celle qui tiendrait ces tirages en noir et blanc pour des variations élaborées à partir de toiles de Boucher ou de Courbet. La formule de Marcel Duchamp selon laquelle « ce sont les regardeurs qui font les tableaux » peut en effet être généralisée : ce sont les regardeurs qui font aussi les photos en y trouvant ce qu’ils y cherchent ou y mettent. C’est à tort que la photographie, parce qu’elle est produite par une machine, est réputée plus fiable que la peinture, produite par la main d’un artiste. Fleischer ruine ce lieu commun confortable.
Toute photo est une fiction visuelle, non moins qu’un tableau.

Philippe Dagen, Alain Fleischer, maître des illusions au Centquatre 

marina-emilova-mysteriousmirror 

Je la revois chez sa couturière, assise devant les grands miroirs à multiples faces, et disant :
"Regarde ! Cinq images différentes du même sujet.
Si j'étais écrivain, c'est ainsi que j'essaierais de dépeindre un personnage, par une sorte de vision prismatique.
Pourquoi les gens ne peuvent-ils pas voir plus d'un profil à la fois ?"

Lawrence Durrell, Justine

 Angélica Páez

Il y a toujours, près du pont de Waterloo, des gens qui regardent le fleuve.
Par les belles après-midi, les couples s’y attardent à bavarder pendant des demi-heures entières; la plupart des promeneurs consacrent trois minutes à la contemplation; quand ils ont comparé leurs impressions avec des impressions précédentes ou prononcé un jugement, ils reprennent leur chemin. Certains jours, les immeubles, les églises, les hôtels de Westminster rappellent la silhouette de Constantinople dans la brume; le fleuve apparaît tantôt somptueusement pourpre, tantôt couleur de boue, tantôt étincelant et bleu comme la mer.
Cela vaut toujours la peine de se pencher sur lui pour voir ce qui s’y passe.

Virginia Woolf, La Traversée des apparences  

Train-of-Thought

Le vent soufflait contre le train ;
des flocons de vapeur, tantôt blanche, tantôt noire, se jouaient à la fenêtre.
Litvinof se mit à les suivre des yeux. Sans cesse ni trêve, s’élevant et tombant, s’accrochant à l’herbe, aux buissons, s’étirant, se fondant dans l’air humide, se pressaient les tourbillons, toujours nouveaux et toujours les mêmes, dans une sorte de jeu monotone et fatigant. Quelquefois le vent tournait, la route faisait un coude, toute cette masse blanche disparaissait pour revenir incontinent à la fenêtre opposée, et une queue interminable cachait aux yeux de Litvinof la vallée du Rhin.

Litvinof regardait, regardait en silence, une réflexion bizarre vint le saisir.
Il était seul dans son wagon ; personne ne le dérangeait. « Fumée ! fumée ! » répéta-t-il à plusieurs reprises, et subitement tout ne lui sembla que fumée : sa vie, la vie russe, tout ce qui est humain et principalement tout ce qui est russe. Tout n’est que fumée et vapeur, pensait-il ; tout paraît perpétuellement changer, une image remplace l’autre, les phénomènes succèdent aux phénomènes, mais en réalité tout reste la même chose ; tout se précipite, tout se dépêche d’aller on ne sait où, et tout s’évanouit sans laisser de trace, sans avoir rien atteint ; le vent a soufflé d’ailleurs, tout se jette du côté opposé, et là recommence sans relâche le même jeu fiévreux et stérile. Il se souvint de ce qui s’était passé sous ses yeux dans ces dernières années, non sans tonnerre et grand fracas... Fumée ! murmurait-il, fumée ; il se souvint des discussions échevelées, des cris du salon de Goubaref, des disputes d’autres gens haut et bas placés, progressistes et rétrogrades, vieux et jeunes... Fumée ! répéta-t-il, fumée et vapeur ! Il se souvint enfin du fameux pique-nique, des propos et discours d’autres hommes d’État et même de tout ce que préconisait Potoughine... 
Fumée ! fumée ! et rien de plus.
Et ses propres efforts, ses sentiments, ses essais et ses rêves ?
Leur souvenir ne provoqua plus qu’un signe de main découragé.

Ivan Tourgueniev, Fumée 

Funny yoga pictures by Emilia Lopez Velarde on Design Art, Retro art

Stupide évocation de la vie libre des déserts.
Qu'ils soient de glace ou de porphyre, sur le navire ou dans le wagon,
perdus dans la foule ou dans l'espace,
cette sentimentale image du désordre universel ne me touche pas.

Robert Desnos, La Liberté ou l'Amour !

photo canvas Print Heart 

II est des nuits où je m'absente
Discrètement, secrètement...
Mon image seule est présente
Elle a mon front, mes vêtements...
C'est mon sosie dans cette glace
C'est mon double de cinéma...
À ce reflet qui me remplace
Tu jurerais... que je suis là...

Nuits d'absence, Jean-Roger Caussimon - Léo Ferré  

MOMA 17 Pablo Picasso Girl Before a Mirror

Voyant son reflet
Dans l'onde du lac elle dit
- Oh j'ai rajeuni

©   Justinius Digitus, Puis la brume se dissipa

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Vidéo Vimeo >>>   Festival Images Vevey – Aftermovie 2020

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jo y Posso - Collages-Sacré-profane

Mais que se cache-t-il
derrière "Image d'Epinal" ?
¡ ˌˌǝuᴉd ɐๅˌp ǝᴉɓɐWˌˌ :

©    Justinius Digitus, L'Enfer doux des corps

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Commentaires
J
Un saint ne naît jamais armé de la sainteté comme d'une cuirasse.<br /> <br /> Un héros ne sort jamais tout cuit d'un moule fabriqué à l'avance.<br /> <br /> La grandeur de l'homme est dans sa complexité.<br /> <br /> Le reste n'est qu'image d'Epinal.<br /> <br /> <br /> <br /> Joseph Kessel, Mermoz (1939)
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